La Commission européenne vient coup sur coup d'annoncer le lancement de deux enquêtes ayant pour objectif de déterminer si Apple respecte bien les règles de concurrence de l'Union européenne. La première concerne les règles de l'App Store, et la seconde Apple Pay. Les deux affaires seront dirigées par Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence au sein de l'Union européenne.
Pour ce qui est des règles de l'App Store, l'affaire a déjà été largement rendue publique, notamment suite à la
plainte de Spotify déposée l'année dernière. C'est justement suite à cette plainte, secondée d'une autre réclamation de Kobo (livres numériques), que cette enquête a été lancée. Les deux plaignants estiment qu'Apple fausse les règles du jeu en prenant sa part sur les transactions sur les ventes et les abonnements alors qu'elle n'est pas soumise à cette règle pour ses propres applications concurrentes.
Les applications mobiles ont fondamentalement changé la façon dont nous accédons au contenu. C'est Apple qui fixe les règles applicables à la distribution des applications aux utilisateurs d'iPhones et d'iPads. Il apparaît qu'Apple a obtenu un rôle de contrôleur d'accès (“gatekeeper”) s'agissant de la distribution des applications et du contenu aux utilisateurs des appareils populaires d'Apple. Nous devons veiller à ce que les règles d'Apple ne faussent pas la concurrence sur les marchés où cette entreprise est en concurrence avec d'autres développeurs d'applications, par exemple avec son service de diffusion de musique en continu Apple Music ou avec Apple Books. J'ai donc décidé d'examiner de près les règles de l'App Store d'Apple et leur conformité avec les règles de concurrence de l'Union.
Margrethe Vestager
La Commission européenne explique qu'elle examinera plus particulièrement deux restrictions imposées par Apple : le système d'achat intégré prioritaire, et l'impossibilité pour les développeurs d'informer les utilisateurs sur les alternatives à ce système intégré. Certains éditeurs ont contourné cette limite en abandonnant totalement la facturation de l'App Store — c'est notamment
le cas de Netflix — mais c'est une décision qui ne peut être prise sans réel dommage que par des éditeurs de tout premier plan.

Margrethe Vestager
Pour ce qui est d'Apple Pay, la Commission européenne va sans surprise s'intéresser à l'accès restreint à la puce NFC de l'iPhone (et de l'Apple Watch), surnommée « tap and go » par Margrethe Vestager. La Commission craint en effet que restreindre l'accès à cette fonctionnalité à Apple Pay ne fausse la concurrence et réduise le choix et l'innovation, alors que c'est là aussi Apple qui fixe les conditions d'accès à sa technologie, prélève sa dîme et se réserve le droit d'écarter un éventuel partenaire.
L'acceptation des solutions de paiement mobile s'accroît rapidement parmi les utilisateurs d'appareils mobiles, car elles facilitent les paiements tant en ligne que dans les magasins physiques. Cette croissance est accélérée par la crise du coronavirus, avec une augmentation des paiements en ligne et des paiements sans contact en magasin. Il apparaît qu'Apple fixe les conditions de l'utilisation d'Apple Pay dans les applications et sur les sites web des commerçants. Elle réserve également la fonctionnalité “tap and go” des iPhones à Apple Pay. Il est important que les mesures prises par Apple ne privent pas les consommateurs des avantages qu'offrent les nouvelles technologies de paiement, notamment en matière de choix, de qualité, d'innovation et de prix compétitifs. J'ai donc décidé d'examiner de près les pratiques d'Apple concernant Apple Pay et leur incidence sur la concurrence.
Margrethe Vestager
La Commission européenne affirme que si elles sont avérées, les pratiques faisant l'objet de ces deux enquêtes
« constituent potentiellement des infractions aux règles de l'Union concernant les accords anticoncurrentiels entre entreprises [article 101 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)] et/ou les abus de position dominante (article 102 du TFUE). » À l'issue des enquêtes préliminaires, la Commission se lance donc dans des enquêtes approfondies. Notons qu'aucun délai légal n'est prévu pour de telles enquêtes, qui selon leur complexité peuvent prendre de nombreux mois avant d'arriver à une conclusion.
Des liens n'apparaissent pas ? Des images sont manquantes ? Votre bloqueur de pub vous joue des
tours. Pour visualiser tout notre contenu, merci de désactiver votre bloqueur de pub !
magister
16 juin 2020 à 19:32
On a aussi appris aujourd'hui, que, saisi par l’association UFC-Que choisir, le tribunal judiciaire de Paris a déclaré illicites plusieurs clauses des services musicaux d’Apple relatives à la collecte et à l’usage des données personnelles. Là où on peut sourire, c'est en lisant le volet financier de cette condamnation : Apple est condamnée à verser 20 000 euros de dommage et intérêts à l’UFC-Que choisir pour « réparation du préjudice occasionné à l’intérêt collectif des consommateurs » ainsi que 10 000 euros de frais de justice. Autant dire peanuts...